On se moque parfois de la naïveté du texte des Béatitudes (« heureux ceux qui… » etc). D’ailleurs ce mot « sent la religion », et je vois des gens sortir ici de la lecture de cet article…
Pour ma part, je l’appelle le texte des « B-attitudes ». C’est le plan B, nécessaire lorsque le plan A ne fonctionne pas. En voici une phrase, version lénifiante : « bienheureux les doux, ils auront la terre en partage ». Mais on peut aussi dire plus fermement (traduction correcte) : « en avant, les non-violents, ils auront la terre en partage ». En général, c’est plutôt : « bienheureux les durs (ou les violents), ils conquerront le monde ! » Le monde, dans ses frontières actuelles et plus anciennes, s’est constitué à force de guerres. Cercle infernal, et je pèse mes mots : c’est l’enfer...
Jésus, par exemple, a tenté de susciter une nouvelle sorte de personnes : ceux qui savent passer de la violence à la force. La force a la même intensité que la violence mais elle est constructive, tout le contraire de la violence.
Le plus dur ce n’est pas de s’armer pour la guerre, c’est de se désarmer, et devenir « désarmant » pour l’adversaire. C’est un des principes de la non violence. Il requiert beaucoup de force, de courage. Jésus va dans ce sens quand il dit (c’est une image, bien sûr) de « tendre l’autre joue » si on reçoit un coup sur la figure… C’est très risqué, mais ça peut surprendre l’adversaire. Répondre à la violence par la violence (cf œil pour œil…) permet parfois un équilibre fragile des tensions en présence, mais en aucun cas ne résout un conflit. Jésus a montré sa force en utilisant la non violence, la voie sacrée d’une humanité nouvelle. Quand est-ce qu’on s’y met tous ? C’est mon rêve, mon utopie. « Un jour nous l’emporterons », comme le disait Martin Luther King. Il n’y a pas de plan A.
Frédéric Steinhauer