Prédication du 2 février 2025, Luc 2, 34-35

Syméon les bénit et dit à Marie, sa mère : 
Voici, celui-ci est établi en vue de la chute et de la résurrection de beaucoup en Israël, et pour signe de contestation.
Toi,  une épée / parole traversera ton âme, afin que soient découvertes dé-voilées  les ruminations de beaucoup de coeurs. 

Frères et sœurs, chers amis, chère famille,

Ça fait un moment que je rumine ce message. Quand j’ai vu le texte, je me suis dit « la vache ». Et c’était une excellente intuition…parfois l’Ecriture est limpide, coule de source…mais souvent elle demande à être ruminée pour devenir nourrissante. 

Regardons de près les vv. 34 e 35

  • L’enfant établi : c’est la pierre d’achoppement, l’histoire va se jouer sur ce qu’on va dire de lui. Et la phrase même se risque à provoquer une controverse possible. Est-ce que Syméon annonce ici un jugement dernier, avec ceux qui vont tomber et ceux qui vont ressusciter, pour l’Evangile de Luc, peut-être la justice enfin rétablie entre pauvres et riches…ou est-ce qu’il décrit un processus spirituel, après être tombé, on peut se relever ? 
  • Un enfant pour signe : seulement pour signe, c’est-à-dire à la merci de nos interprétations 
  • Un signe, comme beaucoup d’autres enseignements évangéliques : être chrétien, c’est seulement être comme une lumière dans la nuit, du sel ou de la levure, ou une église dans le monde, un clocher au milieu du village.
  • Tout humble que soit le signe, il n’en est pas moins puissant, au contraire : c’est un signe de contestation :

Il me faut faire ici une parenthèse : parlons un instant de contestations alors que nous n’en avons pas ! Je veux dire que c’est l’occasion pour moi de vous dire merci d’avoir pu vivre et travailler avec vous et parmi vous sans que se lève les orages de la contestation qu’on voit hélas dans beaucoup d’endroits (enfin, si vous en avez, il faut vous dépêcher de le dire).

Notre foi nous a uni, mes amis du Conseil de paroisse, mes amis paroissiens si agréables. Ne pensez pas que c’est une évidence. C’est un miracle. Une raison de rendre grâce à Dieu d’avoir trouvé le chemin de cette vie en paix, en communauté.

  •  Car à lire cette phrase, Jésus comme signe de contestation en regard des Evangiles, ont comprend bien que cette présence divine est là pour dévoiler des conflits. Par exemple générés par ceux qui réclameront à Jésus d’autres signes de sa présence, demandes auxquelles et il résistera en général. « Pas d’autre signe que Jonas », vous connaissez sans doute la phrase, en Luc 11)
  • Une contestation, on en voit une en ce moment dans les controverses autour de Monsieur le Président Trump. Dans « Réformés », interview d’un pasteur très confessant qui cautionne la récupération messianique du président : il pense que Dieu l’a sauvé d’un attentant pour gouverner, à l’exemple du Roi Cyrus dans l’AT, un non croyant peut être utilisé par Dieu pour le salut. J’espère que vous avez aussi vu sur les réseaux le message évangélique de la pasteure Mariann Budde et son appel au Président à exercer la miséricorde.

C’est au sens propre déchirant d’entendre ce genre de choses, de se confronter à ce genre de choses. Du coup la parole à Marie est peut-être moins étrange qu’il n’y paraît. N’est ce pas d’une étonnante actualité pour les chrétiens :

Une épée qui transperce / traverse pour le dévoilement des ruminations des coeurs 

  • Parole trop violente pour une jeune accouchée. Je ne peux pas croire que Syméon soit aussi maladroit. On dit en générale que c’est l’annonce de la souffrance infinie de Marie devant son fils crucifié. ?

Les jeunes parents n’ont pas besoin d’attendre que l’enfant soit adulte pour que son existence révèle les limites de nos capacités d’aimer.

C’est un verbe au futur, pourtant l’âme de Marie a déjà été traversée – pourquoi traduire par transpercer seulement ici un verbe d’espérance : traverser – Cf le Magnificat

Traversée par l’annonce de l’ange, puis traversée, comme toute mère, par la présence de l’enfant qui va venir à travers elle précisément.

Un enfant, signe de la vie qui se fraie un chemin. (Pour nous, Lia, comme l’étoile des mages)

Episode suivant : fugue de Jésus à 12 ans et inquiétude des parents (montrer où se trouverait la scène dans l’église, entre le vitrail de la nativité et celui de la prise de parole au temple à 12 ans)

La parole de Syméon est « apocalyptique ». Non pas catastrophique, mais dé-couvrante.

On se réjouit bien des dé-couvertes scientifiques !

Ici, c’est une dé-couverte spirituelle : nous pouvons être traversés par Dieu, à la suite de Marie qui savait « garder les paroles dans son cœur ».

Je crois que comme dans l’Apocalypse, cette épée qui traverse Marie est celle de la parole. Voici la révélation chrétienne. Sans doute que l’avertissement de Syméon annonce la Croix. Mais ce n’est pas une prophétie de malheur. C’est l’espérance que l’on puisse reconnaître dans le Christ vivant la présence de Dieu.

Le travail pastoral est celui de l’accompagnement de ces moments de traversées et de découvertes. 

L’action de cette épée/parole permet d’exprimer les ruminations.

Comme par exemple, dans les moments d’accompagnements, où le travail pastoral consiste à aider à mettre des mots sur ce qui se passe dans nos vies. 

C’est aussi l’accompagnement des ruminations collectives, comme quand nous avons cherché ensemble s’il était bon de pouvoir bénir des couples de même sexe…ou comment faire face aux consignes de confinement.

Prions que d’autres pasteurs soient appelés, non seulement pour notre paroisse, mais dans toute l’Eglise, pour nous aider à ruminer. Car c’est ainsi en ruminant, que la parole se fait nourriture. 

L’Evangile se terminera ainsi sur les ruminations des disciples d’Emmaüs, figurant les ruminations de l’Eglise naissante : que pouvons-nous faire avec une telle histoire à raconter ?

Et la dernière parole de séparation est une bénédiction : 

Luc 24,51 Comme il les bénissait, il se sépara d’eux

En nous séparant avec une parole de bénédiction, nous mettons en oeuvre notre foi, même dans le déchirement ou face à la nostalgie qui nous guettent. Voilà ce que je pouvais vous partager en ce jour de chandeleur, tradition qui nous invite pour terminer le temps de Noël à allumer des bougies …et à faire des crêpes en forme de soleil (plafond de l’Eglise de St-Saphorin).

Amen

Pensée du jour

Abischaï dit à David: Dieu livre aujourd'hui ton ennemi entre tes mains ; laisse-moi, je te prie, le frapper de ma lance et le clouer en terre. (1 Samuel 26,8)

Lire la suite Proposé par : Pain de ce jour