« Et si Jésus se mettait en colère… à cause de notre mauvaise foi ? » (17.11.24)

Lecture de Marc 11, 12-26

12Le lendemain, au moment où ils quittaient Béthanie, Jésus eut faim. 13Il vit de loin un figuier qui avait des feuilles, et il alla voir s'il y trouverait des fruits ; mais quand il fut près de l'arbre, il ne trouva que des feuilles, car ce n'était pas la saison des figues. 14Alors Jésus dit au figuier : « Que personne ne mange plus jamais de tes fruits ! » Et ses disciples l'avaient entendu.

15Ils arrivent à Jérusalem. Jésus entra dans le temple et se mit à chasser ceux qui vendaient et qui achetaient dans le temple ; il renversa les tables des changeurs d'argent et les sièges des marchands de colombes, 16et il ne laissait personne transporter quoi que ce soit à travers le temple. 17Il enseignait et leur disait : « Les Écritures ne disent-elles pas : “Ma maison sera appelée une maison de prière pour tous les peuples” ? Mais vous, vous en avez fait une caverne de brigands ! » 18Les chefs des prêtres et les spécialistes des Écritures apprirent cela et ils cherchaient comment faire mourir Jésus ; en effet, ils avaient peur de lui, parce que toute la foule était impressionnée par son enseignement. 19Le soir venu, Jésus et ses disciples sortirent de la ville.

20Le lendemain matin, en passant, ils virent le figuier : il était complètement sec jusqu'aux racines. 21Pierre se rappela ce qui s'était passé et dit à Jésus : « Rabbi, regarde, le figuier que tu as maudit est devenu tout sec. » 

1re fin, fait semblant de repartir, quand Benjamin lui demande « : s’il te plaît Marie, lis-nous la version longue ! » Marie continue :

22Jésus dit alors à ses disciples : « Ayez foi en Dieu ! Je vous le déclare, c'est la vérité : 23Si quelqu'un dit à cette montagne : “Ôte-toi de là et jette-toi dans la mer”, et qu'il ne doute pas dans son cœur, mais croit que ce qu'il dit arrivera, cela lui sera accordé. 24C'est pourquoi, je vous dis : Tout ce que vous demandez dans la prière, croyez que vous l'avez reçu et cela vous sera donné. 25Et quand vous êtes debout pour prier, si vous avez quelque chose contre quelqu'un, pardonnez-lui, afin que votre Père qui est dans les cieux vous pardonne aussi vos fautes. »

Prédication : « Et si Jésus se mettait en colère… à cause de notre mauvaise foi ? »

Résumé : Devant le figuier, la colère de Jésus est incompréhensible. Mais elle s’éclaire avec l’épisode bien connu des marchands du temple qui ont transformé cette « maison de prière » en « caverne de brigands ». Tel un père qui se met en colère devant son enfant qui fait fausse route et se met même en danger, Jésus se met en colère à cause de la dangereuse religiosité mercantile, individualiste, sacrificielle et superficielle de son temps, qui mène à un assèchement spirituel, qui ne donne pas de fruit. A l’inverse, il invite à « avoir foi en Dieu », à tisser une relation avec Lui dans la prière, et c’est cela qui donnera du fruit.

 

Prédication à écouter ici.

 

Chers frères et sœurs en Christ,

C’est quand la dernière fois que vous vous êtes mis en colère, mais vraiment en colère ?

  • Quand vous avez poussé votre coup de gueule et que vous êtes sortis de vos gonds, tellement d’ailleurs que vous lui avez montré combien vous étiez balèze et avec plein d’abdal ?
  • Quand votre enfant voulait ABSOLUMENT le dernier accessoire à la mode et que dans le magasin, vous avez pété un plomb ?
  • Quand vous avez voulu raconter une blague à votre collègue mais que c’était pas le bon moment :
    • Tu connais le père lachaise ? 
    • Non pourquoi
    • (chaise balancée)
    • Excellent !
  • D’ailleurs, que dit un informaticien en colère ? « Fichiiiiiier ! »

Devant le monde nous aussi, nous pouvons nous mettre en colère. Devant l’injustice des guerres qui détruisent et exterminent, devant la persécution de tant de chrétiens dans le monde (1 sur 7 selon l’ONG Portes Ouvertes), devant la trumpisation désespérante du monde, devant la stupidité et l’incompétence de tant de gens, nous aussi nous pouvons nous mettre en colère.

La colère, chers frères et sœurs, elle n’est pas mauvaise en soi. C’est une émotion qui surgit en nous, qui dit qu’une limite a été dépassée du côté de l’injuste, de l’insupportable. Et Jésus lui aussi, dans le passage du jour, se met en colère. Oh pas une petite colère. Il se met en pétard, BANG, cela explose. Il est d’une virulence à laquelle nous sommes peu habitués de sa part. 

Au départ, nous trouvons ça un peu rude. Car nous ne comprenons pas cette mystérieuse condamnation du figuier à belles feuilles… pourquoi s’en prendre à un figuier qui n’a pas de fruits, alors même que ce n’était pas la saison des figues ? Pourquoi cette sévérité de jugement impitoyable et sans seconde chance, à l’inverse du même passage chez Luc (Lc 13,6-9) ? C’est rude.

Parfois en lisant la Bible, il faut accepter d’entendre sans comprendre. C’est ce que conclut l’évangéliste Marc à ce premier épisode du figuier : Et ses disciples l'avaient entendu. Accepter de ne pas comprendre, mais malgré tout d’entendre et de garder ces paroles pour la suite, c’est cela la réalité des disciples dans ce passage. C’est aussi la nôtre bien souvent dans notre vie : combien de fois des paroles bibliques obscures viennent s’éclairer seulement bien plus tard sur notre chemin de vie ? 

Bon. Nous pressentons donc qu’il y a quelque chose de symbolique là-derrière. Si Jésus se met en pétard d’une telle manière, c’est qu’il y a une raison ! Mais laquelle ?

Marc nous donne une clé d’interprétation en insérant, entre les deux parties de cette parabole du figuier sans fruits, cet épisode bien connu où Jésus chasse les marchands du Temple. Explications.

A l’époque, dans la culture de l’Ancien Testament le figuier est à la fois associé à la sécurité et à la paix que Dieu donne à son peuple, et à la fois un lieu privilégié pour méditer la parole de Dieu. Nous en trouvons une trace dans la rencontre entre Philippe et Nathanaël qui est relatée dans l’évangile de Jean (1,47-51). Ainsi le figuier est le symbole du temple de Jérusalem de l’époque. De l’extérieur, il est majestueux et fait illusion. Mais en réalité, il est stérile, il ne sert à rien. Oui la malédiction du figuier est le signe de la stérilité du temple…

Ainsi, Jésus, un peu à la manière des prophètes de l’Ancien Testament, pose un acte prophétique en chassant les marchands du temple. Le temple n’est plus une « maison de prière », elle est devenue « caverne de brigands », comme lorsque le prophète Jérémie qui dénonçait ceux qui allaient au temple pour se faire une bonne conscience alors qu’ils vivaient dans l’injustice (Jr 7,11). Les marchands du temple sont ainsi le symbole d’un vol fondamental et dangereux : le vol de Dieu lui-même, le vol d’une spiritualité. Ce texte est donc avant tout une véritable polémique contre le temple de Jérusalem tel qu’il fonctionnait à l’époque, un supermarché du religieux où l’on obtient les faveurs de Dieu contre quelques pièces. Comment ne pas penser au moine Martin Luther qui combattit les indulgences lors de la Réforme en 1517 ?

Oui chers frères et sœurs, devant cette religiosité mercantile, individualiste, sacrificielle et superficielle de son temps, Jésus se met en colère. Tel un père qui se met en colère devant son enfant qui fait fausse route et qui se met même en danger, Jésus pète un câble. Ce chemin ne conduit pas à la vie, mais à la mort. Ce chemin mène à un assèchement spirituel, qui ne donne pas de fruit. Il est urgent de se rendre compte de ce danger-là. D’où la colère de Jésus.

Le texte resterait un peu dur à avaler si nous n’avions pas « la version longue », comme je l’ai dit tout à l’heure à Marie qui a fait la lecture. En effet, les versets 22-25 viennent éclairer positivement cette colère, autrement dit Jésus nous dit ici en termes positifs quel est le chemin à suivre et la bonne nouvelle qui s’ensuit… Et ce chemin, chers frères et sœurs, c’est celui de la prière. En effet, Jésus invite à « avoir foi en Dieu », à tisser une relation avec Lui dans la prière, à enraciner profondément cette relation dans la prière régulière, et c’est cela qui donnera du fruit. 

Jésus oppose donc ici la prière à la pratique religieuse du temple. Un homme de foi, par sa seule prière, peut déplacer les montagnes, même sans temple, sans prêtre, sans sacrifice… Mais attention, Jésus ne dit pas que tout ce que l’humain demander sera exaucé, mais plutôt que celui qui prie sans hésiter fera de grandes choses, que Dieu pourra faire de grandes choses à travers lui.

Et nous, qui sommes-nous dans cette histoire ? sommes-nous comme les marchands du temple ou comme les personnes qui venaient y trouver un sentiment d’être rassuré ? comment vivons-nous notre foi ? celle-ci est-elle asséchée ou enracinée ? comment vivons-nous en prière… ou pas ? 

La prière, je le crois, ce n’est pas un distributeur automatique qui nous donnerait ce que nous voulons, non nous savons bien que Dieu répond souvent à nos prières de manière détournée, qu’Il nous surprend. La prière est une mise en route sur un chemin qui ne compte plus que sur Dieu.

La prière, c’est ce lien que nous avons à tisser dans notre relation à Dieu. La prière c’est parler mais c’est aussi bien sûr écouter. La prière c’est ce qui nous aide à cultiver notre foi en Dieu, à empêcher qu’elle se dessèche comme le figuier.

Alors en fin de compte, qu’est-ce que la colère de Jésus nous dit pour aujourd’hui ? Eh bien je crois, chers frères et sœurs, que Jésus nous demande instamment de quitter ces chemins de foi mortifères, de délaisser la mauvaise foi qui est mercantile, individualiste, sacrificielle et superficielle, pour nous ouvrir à la foi en Dieu, totale et confiante, à travers la prière, à l’instar de Jésus à Gethsémané qui priait ainsi : « Abba, père, tout est possible pour toi ; éloigne de moi cette coupe de douleur. Toutefois, non pas ce que moi je veux, mais ce que toi tu veux. » (Marc 14,36) Il nous invite à tisser une relation avec Lui dans la prière, et c’est cela qui donnera du fruit.

Pour notre Eglise MLK aussi, au cœur de ce centre-ville mercantile, qui vend un salut bon marché, avec son lot de ténèbres et de précarité, de demeurer « une maison de prière pour tous les peuples ». Pour tous les peuples. Pour chacune et chacun, quel qu’IEL soit, qu’elle que soit son origine, son statut social, son orientation affective ou son chemin de foi. Une maison de prière pour tous les peuples pour Le laisser agir ici. Car la bonne nouvelle est ici : 

Si nous plaçons notre confiance absolue en lui, si nous nous ouvrons totalement à Lui et le laissons faire, alors tout est possible. Même des fruits en hiver.

Amen

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