« Relevez-vous, n'ayez pas peur ! »
Lecture de Matthieu 17, 1-9 : Moïse et Élie parlent avec Jésus
1Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, frère de Jacques, et les conduit à l'écart sur une haute montagne. 2Il fut transformé devant eux ; son visage se mit à briller comme le soleil et ses vêtements devinrent blancs comme la lumière. 3Soudain Moïse et Élie leur apparurent et tous deux parlaient avec Jésus. 4Pierre dit à Jésus : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici. Si tu le veux, je dresserai ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Élie. » 5Il parlait encore, lorsqu'une nuée lumineuse vint les couvrir, et de la nuée une voix se fit entendre : « Celui-ci est mon fils bien-aimé, en qui je mets toute ma joie. Écoutez-le ! » 6Quand les disciples entendirent cette voix, ils eurent tellement peur qu'ils se jetèrent face contre terre. 7Jésus s'approcha, les toucha et dit : « Relevez-vous, n'ayez pas peur ! » 8Ils levèrent alors les yeux et ne virent plus que Jésus, seul. 9Tandis qu'ils descendaient de la montagne, Jésus leur fit cette recommandation : « Ne parlez à personne de cette vision, jusqu'à ce que le Fils de l'homme ressuscite d'entre les morts. »
Prédication : « Relevez-vous, n'ayez pas peur ! »
Résumé : Face à nos peurs, notamment celle de l’avenir, Jésus vient nous consoler, comme en ouvrant sur la résurrection à venir. Il nous invite à prendre le chemin de l’écoute pour transfigurer nos vies.
Chers frères et sœurs en Christ,
De quoi avez-vous peur ? Peur des araignées ? Peur du noir ? (« Quand j’étais petit, j’avais peur du noir, aujourd’hui quand je vois ma facture d’électricité j’ai peur de la lumière… ») Peur de… croiser Pierre Palmade en voiture ? (désolé, elle m’a fait rire) Peur de manquer, comme dans ces toilettes ? Et si vous ne savez pas de quoi vous avez peur, le remplissage automatique de votre natel peut le faire pour vous, comme ici sur mon mur Facebook. J’ai peur des… (ex)
- … des vacances…
- … de me faire parvenir le devis pour la suite à notre conversation téléphonique de ce message par erreur merci
- … des gens qui ne sont pas encore ouvertes à la maison de paroisse
- Etc.
Plus sérieusement, la peur est cette émotion qui nous habite tous. Parfois de manière très diverse, parfois très en profondeur. Peur de la mort. Peur de perdre un proche ou plus globalement de devoir faire des deuils. Peur de l’avenir, aussi, comme dirait le Chat : « L’avenir me fait peur, je lui tourne le dos et il est toujours devant moi ».
De nos jours, 3 jeunes sur 4, de 16 à 25 ans, ont peur de l’avenir. L’éco-anxiété, ou l’angoisse chronique spécifique au réchauffement climatique, touche la grande majorité des jeunes générations. Près de 40% d’entre eux hésitent à avoir des enfants pour ces raisons. C’est interpellant non ?
Les disciples aussi ont peur de l’avenir. Dans le passage du jour, Jésus vient de leur annoncer qu’il lui fallait « aller à Jérusalem, souffrir beaucoup de la part des anciens, des chefs des prêtres et des spécialistes des Écritures, être tué, et, le troisième jour, ressusciter » (Mat 16,21). La réponse des disciples ne se fait pas attendre. Pierre lance à Jésus : « Dieu t'en garde, Seigneur ! dit-il. Non, cela ne t'arrivera pas ! ». Non, ce n’est pas possible, pas toi Jésus, pas toi le maître et Seigneur, on ne peut pas te perdre… Vous imaginez la détresse et l’incompréhension qui a pu habiter les disciples ? Peur de cet avenir incompréhensible.
Et Jésus que fait-il ? il leur demande de le suivre. Le suivre, en premier lieu, concrètement sur cette montagne où il va être transfiguré. En fait, par cette apparition mystérieuse et mystique de la transfiguration, Jésus va répondre à leur peur suite à l’annonce de la passion. Il va les consoler et ouvrir sur la résurrection à venir ! Regardons cela de plus près.
2Il fut transformé devant eux ; son visage se mit à briller comme le soleil et ses vêtements devinrent blancs comme la lumière. En cet homme, Jésus de Nazareth, se donne à voir la lumière de Dieu dans sa gloire. Car Jésus est bien celui qui récapitule la loi (Moïse) et les prophètes (Elie). Oui par ces signes extraordinaires et mystérieux que sont la transfiguration du visage et des vêtements de Jésus, l’apparition de Moïse et Elie, et enfin la nuée lumineuse, Dieu se donne mystérieusement à voir. Il s'offre à la contemplation de ses disciples « préférés ». Mais c'est de façon fugitive et éphémère.
Et les 3 disciples, que font-ils ? ils contemplent Jésus dans sa gloire. Mais, en comprennent-ils toute la portée ? Assurément, non, puisque le fougueux Pierre propose de construire trois tentes : l’une pour Jésus, les autres pour Moïse et Elie ! En fait, il désire fixer l’évènement. Or, Jésus va constamment de l’avant. Jésus a accordé aux disciples le privilège de voir que le chemin de souffrance par lequel il allait passer n’était en fait pas une impasse. Bien sûr, il y aura la croix, comme il y a nos chemins de souffrances. Mais toute la réalité n’est pas contenue dans ce que nous croyons voir.
Car le message que Dieu veut nous révéler, en fait, il ne se voit pas. Il s’écoute. « Celui-ci est mon fils bien-aimé, en qui je mets toute ma joie. Écoutez-le ! » La voix qui retentit dans la nuée (une autre manifestation de la présence de Dieu) dit exactement la même chose que celle qui avait été entendue lors de du baptême de Jésus (Mt 3,17)… en ajoutant toutefois ces mots : « Écoutez-le ! »
Ecoutez-le : cela me rappelle cette image bien connue : « mon Dieu, quand je te parle, j’aimerais bien que tu m’écoutes ! » Et Dieu de répondre : « Eh bien moi aussi figure-toi !» L’écoute de Dieu comme chemin pour faire face à nos peurs, dont celle de l’avenir.
Mais les disciples, en entendant cette voix, sont loin d’être rassurés. Non en fait, ils ont peur. 6Quand les disciples entendirent cette voix, ils eurent tellement peur qu'ils se jetèrent face contre terre. C’est intéressant: devant un signe de la présence de Dieu, l’homme de la Bible ne commence pas par s’émerveiller, non il s’effondre dans la crainte, face contre terre. Cette crainte est présente dans les trois Evangiles synoptiques (Matthieu, Marc et Luc). Pourtant, seul le récit chez Matthieu contient le geste et la parole de Jésus. Celui-ci, d’abord, s’approche, puis il touche les disciples, signe de sa compassion envers ses amis. Jésus est dans sa gloire, mais une « gloire bienveillante », comme disait si joliment Marie jeudi à la prière. Et enfin il leur parle, avec ces mots que l’on pourrait traduire par « Soyez relevés une fois pour toute » ! Le verbe egeiro, verbe utilisé pour « se relever » est également celui de la résurrection. Anticipation de la gloire pascale, cette parole ne peut donc véritablement être comprise qu’à la lumière de Pâques qui inclut le chemin de croix. Oui Jésus, si glorieux, s'approche de nous pour nous dire de ne pas avoir peur. Et il nous invite à nous préparer à la résurrection à venir dans nos vies.
Alors, chers frères et sœurs, pour ce temps de carême tout particulièrement, écoutons-le, écoutons le Christ.
Écoutons-le nous enseigner en paroles et actes, tels que relatés dans les évangiles, que la Vie est plus forte que la mort.
Écoutons-le quand il nous dit de nous relever et de ne pas avoir peur, alors que lui est en train d’annoncer sa passion, ses souffrances, sa croix.
Écoutons-le quand il nous parle de pardon, de guérison et nous appelle à changer de vie.
Écoutons-le dans la prière au plus intime de notre cœur, écoutons-le dans la Parole qui est Parole de Vie pour nous, Parole de confiance, Parole d’espérance.
Écoutons-le nous dire « Relevez-vous, n'ayez pas peur ! ».
Oui frères et sœurs, voici le chemin à suivre pour faire face à nos peurs et transfigurer nos vies : écouter le Christ, le Sauveur, qui nous enseigne l’espérance, quelles que soient nos peurs, nos souffrances, nos croix... L’écouter sans crainte, mais avec confiance, confiant justement qu’Il nous relève dans nos vies. Être relevés, c’est ne pas se laisser abattre par la peur, mais se laisser toucher par le Christ qui s’approche et entendre cette parole pour notre vie : « Relevez-vous et soyez sans crainte ! »
Ici à MLK, nous sommes bien en plaine, mais mon souhait est que ce lieu puisse être cette « montagne de la contemplation », comme disait Hugues ! Un lieu où l’on puisse vivre la rencontre avec le Christ, le Transfiguré, le Ressuscité, qui vient nous consoler et nous relever ; un lieu où vivre une expérience dans la présence de ce Dieu qui peut venir transfigurer nos vies. Un lieu où nous puissions dire : Seigneur, il est bon que nous soyons ici. Et même si, comme Pierre, nous aimerions bien planter des tentes ici au milieu de l’église, nous savons que ce n’est pas possible, que nous devons repartir au charbon pour faire face à tous les défis de notre existence, à toutes nos peurs, y compris celle de l’avenir, de la souffrance et de la mort.
Oui chers frères et sœurs, écoutez cette bonne nouvelle : Face à nos peurs, notamment celle de l’avenir, Jésus vient nous consoler, nous toucher, nous relever. Ce faisant, il ouvre sur la résurrection à venir, aussi pour nous. Il nous invite à prendre le chemin de l’écoute de Sa Parole pour transfigurer nos vies. Qu’en dites-vous ? Moi je dirais : « même pas peur ! »
Amen.