« La joie d’enfanter le Christ » (01.12.24)
Luc 1,39-45 : Marie rend visite à Élisabeth
39Dans les jours qui suivirent, Marie se mit en route et se rendit en hâte dans une localité de la région montagneuse de Judée. 40Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth. 41Au moment où celle-ci entendit la salutation de Marie, l'enfant bondit dans son ventre. Élisabeth fut remplie de l'Esprit saint 42et s'écria d'une voix forte : « Dieu t'a bénie plus que toutes les femmes et sa bénédiction repose sur l'enfant que tu portes ! 43Qui suis-je pour que la mère de mon Seigneur vienne jusqu'à moi ? 44Car, vois-tu, au moment où j'ai entendu ta salutation, l'enfant s'est mis à bondir de joie dans mon ventre. 45Tu es heureuse : tu as cru que le Seigneur accomplira ce qu'il t'a annoncé ! »
Prédication : « La joie d’enfanter le Christ »
Résumé : La rencontre entre deux femmes enceintes, la jeune Marie enceinte du Christ, et la vieille Elisabeth enceinte de Jean, celui que l’on nommera ensuite le baptiste, suscite une joie dans l’urgence, une joie d’être porteuse de vie, une joie d’être « en espérance », une joie d’être porteuse de Christ. Et si pour ce temps de l’Avent nous aussi réfléchissions comment nous sommes, femmes et hommes, chacune et chacun, porteur·euse du Christ ? et comment nous nous préparons, chacune et chacun, à enfanter le Christ dans nos vies ?
Prédication à écouter ici.
Chers sœurs et frères en Christ,
C’était comment la dernière fois que vous vous êtes sentis « enceint·e » ?
- Agréable pour le plateau-tv avec gâteau, un peu moins pour attacher les souliers ou ramasser sa clé… ?
- C’était bien au début (une immense joie), moins à la fin (un immense poids) ?
- En passant, quel est le comble pour une femme (humoriste) enceinte ? faire un bide… (palampamtschi)
- D’ailleurs en débutant cette prédication, je crains fort de perdre une partie de mon audience, que ce soit des femmes qui ne sont jamais tombées enceintes ou simplement des hommes, même si l’émoji « Homme enceint » vient d’être rajouté sur vos téléphones (à ne pas confondre avec « homme buveur de bière »)… #jedisçajedisrien
Plus sérieusement. C’était comment la dernière fois que vous avez enfanté ? porté un projet de vie ? donné naissance à de la vie, que vous avez pro-créé, créé pour… votre dernier projet en gestation, c’était comment ? joie ? crainte ? réjouissance ?
Et puis, je m’interroge : quand nous sommes porteuse, porteur de vie, est-ce que nous nous rendons compte de ce que cela va être ? savons-nous ce que le bébé va devenir ? Sentons-nous quelle direction va prendre la vie qui va être donnée ou le projet qui est en train de naître ? savons-nous comment va pousser l’Eglise qui vient d’être plantée, comme ce fut le cas pour MLK il y a 3 ans ?
Ce matin, l’actrice principale de notre texte biblique, c’est Marie, mère du Christ. Ce matin, je vous propose d’essayer d’imaginer ce que Marie, à l’époque, a pu ressentir. Commençons le voyage en méditant ce gospel : « Mary did you know ? » (avec des images de « The Chosen »)
regarder VIDEO MARY DID YOU KNOW (JORDAN SMITH - THE CHOSEN)
Marie savais-tu ? Marie, savais-tu que ton petit garçon marcherait sur l’eau ? que ton enfant ferait des miracles ? Marie savais-tu que ton enfant serait l’agneau qui mourrait pour nous sauver ?
Nous ne savons pas ce que Marie savait de ce qui se passait dans son ventre. Nous ne savons pas ce qu’elle ressentait, pensait, imaginait pour son enfant à naître. Mais ce que nous savons, c’est que la première chose que Marie a fait, c’est d’aller « en hâte » visiter sa cousine Elisabeth. Comme s’il y avait urgence. Une urgence à partager la bonne nouvelle. Une urgence à dire l’espérance. Une urgence à être ensemble pour se soutenir mutuellement (et Marie restera 3 mois auprès de sa cousine).
Marie et Elisabeth se ressemblent avec chacune des grossesses miraculeuses. L’une est jeune, vierge, et porte le Sauveur à venir ; l’autre, sa cousine, est âgée, trop pour enfanter, et porte Jean, celui que l’on nommera le Baptiste. Celui dont la mission sera d’annoncer le Sauveur à venir.
D’aucuns voient en elles des symboles : Marie, c’est la Nouvelle Eve, l'humanité nouvelle qu’inaugure la naissance du Christ, alors qu’Elisabeth représente l'Ancienne alliance. Oui, on pourrait faire une lecture symbolique de notre texte et y lire comme un résumé de l'histoire du salut, comme si le baiser de Marie à sa cousine signifiait l'embrassade de l'Église à la synagogue… et en quelque sorte le "passage de relais" entre judaïsme et christianisme.
Mais ce matin, je ne ferai pas une telle lecture. Ce matin, je vous propose, chers sœurs et frères, de rester terre-à-terre. Ces deux femmes qui se rencontrent, ce sont d’abord deux femmes, deux êtres, porteuses de vie qui se rencontrent, dans l’action de l’Esprit Saint. Et ce n’est pas anecdotique. Car l’Esprit nous ouvre à la joie et à la bénédiction.
Et dans ce texte, la joie de la vie, c’est d’abord le tressaillement du bébé. La danse. L’enfant qui est dans le ventre d’Elisabeth sait déjà ! Jean, déjà, est celui qui annonce et désigne Jésus !
La joie, ensuite, c’est un cri, un cri de joie, un cri d’urgence, un cri d’enthousiasme, cri qui rappelle le premier cri, celui de la naissance ; c’est un cri irrépressible, qui véritablement jaillit du cœur d’Elisabeth. Elle ne susurre pas sa bénédiction, mais elle la proclame à haute voix. « Dieu t'a bénie plus que toutes les femmes et sa bénédiction repose sur l'enfant que tu portes ! »
Oui la joie, en fin de compte, mène à la bénédiction. Avant que Marie ne prenne la parole, Elisabeth connait sa situation, elle sait que la toute petite graine qui mûrit dans son ventre est une bénédiction. Elisabeth est dans la reconnaissance, dans les deux sens du terme. Elle reconnaît l’enfant qui est dans le sein de Marie et elle dit sa reconnaissance : la reconnaissance/identification la conduit à la reconnaissance/gratitude. Et à la bénédiction.
C’est quand la dernière fois que vous vous êtes laissés gagnés par la joie qui tressaille en vous, qui crie en vous ? c’est quand la dernière fois que vous avez dit des paroles de bénédiction pour la vie d’autrui ? c’est quand la dernière fois que vous avez été enceint·e, au sens large, c’est quand la dernière fois que vous avez été porteur·euse de vie et que vous vous êtes préparés à enfanter ?
Oui chers frères et sœurs, permettez-moi ce matin d’être audacieux, pour ne pas dire un peu fou. Je suis convaincu que cette rencontre entre Marie et Elisabeth, n’est pas seulement une histoire de femmes. Ce texte, je le crois intimement, nous indique que, femme ou homme, nous portons en nous cet éclat de vie et d’espérance, cette promesse d’avenir que nous avons à porter et à faire grandir. Oui ce matin, ce texte nous dit que nous sommes chacune et chacun, quel que soit notre sexe, notre âge, porteuse et porteur de Christ. Que, même si aucune échographie ne pourra le prouver, nous sommes « enceints » du Christ, nous portons en nous cette promesse d’une parole qui se fait chair. Et que… nous avons à nous préparer à cet enfantement à venir. Dans la joie.
En ce premier dimanche de l’Avent, se pose donc à nous cette question : comment suis-je porteuse, porteur du Christ et comment me préparer à sa venue dans ma vie ? quelle est cette espérance que je souhaiter enfanter ?
En ce jour, nous entrons dans l’Avent, ce temps de préparation à Noël. Pour ces 24 jours à venir, quel est le chemin qui va me conduire vers la crèche de Noël : comme Marie, en hâte, vers la frénésie de Noël, pour annoncer cette naissance à venir ? ou comme Elisabeth, à la maison, prête à la rencontre ? Comment je me prépare humblement à donner la vie, moi aussi, à mon petit niveau ?
La bonne nouvelle de ce matin, chers sœurs et frères en Christ, c’est que nous sommes tous et toutes enceint·es du Christ, nous le portons tous et toutes en nous. Marie porte le Christ en elle biologiquement, nous sommes invités à le porter en nous spirituellement. Alors préparons-nous !
Car aujourd’hui espérer est une urgence. Partager sa joie est une urgence. Annoncer Sa venue est une urgence. A dire partout. Et pas seulement à la maternité.
Amen.