Vos lieux de culte Église 29

Jésus, revêtu de la puissance de l’Esprit, retourna en Galilée,

et sa renommée se répandit dans tout le pays d’alentour.

Il enseignait dans les synagogues, et il était glorifié par tous.

16Il se rendit à Nazareth, où il avait été élevé, et, selon sa coutume, il entra dans la synagogue le jour du sabbat.

Il se leva pour faire la lecture, et on lui remit le livre du prophète Ésaïe.

L’ayant déroulé, il trouva l’endroit où il était écrit:

"L’Esprit du Seigneur est sur moi,

parce qu’il m’a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres;

Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé,

pour proclamer aux captifs la délivrance,

et aux aveugles le recouvrement de la vue,

pour renvoyer libres les opprimés,

pour publier une année de grâce du Seigneur."

Ensuite, il roula le livre, le remit au serviteur, et s’assit.

Tous ceux qui se trouvaient dans la synagogue avaient les regards fixés sur lui.

Alors il commença à leur dire: “Aujourd’hui cette parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, est accomplie.”

Évangile selon Luc 4, 14-21

 

 

« Aujourd’hui est accomplie

cette parole de l’Écriture

que vous venez d’entendre. »

 

Frères et sœurs,

la parole de Jésus semble bien audacieuse.

Au moment où il la prononce, il n’a encore presque rien fait.

Pas de guérison.

Pas de miracle.

Pas de grands discours comme le Sermon sur la montagne.

Il n’a même pas encore appelé ses disciples.

Il est au tout début de son ministère.

 

Rien de concret à faire valoir pour étayer ses dires.

Mais cela n’empêche pas ses paroles d’être catégoriques :

« Aujourd’hui est accomplie

cette parole de l’Écriture

que vous venez d’entendre. »

 

Quelle est cette parole qui est accomplie ?

 

« L’Esprit du Seigneur est avec moi ;

c’est pourquoi il m’a oint

pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres.

Il m’a envoyé pour publier la liberté aux captifs

et le recouvrement de la vue aux aveugles,

pour renvoyer libres ceux qui sont dans l’oppression,

et pour proclamer l’année favorable du Seigneur. »

 

Si l’on écoute attentivement ces mots que Jésus s’approprie,

il n’y est  pas question de résultats qui devraient déjà être là.

Ce qui est souligné,

c’est une mission dont Jésus se dit porteur

et pour laquelle c’est Dieu qui le mandate :

le Seigneur, l’Éternel.

 

Jésus ne parle pas d’une envie qu’il aurait,

ou d’un rêve qu’il ferait à la manière de Martin Luther King.

Il parle de la tâche que Dieu lui a confiée.

Parce que c’est sa volonté à Lui, à l’Éternel,

que ceux qui sont enfermés voient à nouveau la lumière.

 

C’est quelque chose de très fort

qui a lieu dans la synagogue de Nazareth.

La vision d’Ésaïe pouvait sembler une gentille utopie

face à laquelle on ne pouvait que soupirer :

« Ah, si seulement c’était comme ça ! »

 

Seulement là, en Jésus,

cette vision reçoit un point d’ancrage dans le réel.

Les paroles du prophète ne sont plus un fantasme.

C’est un projet : le projet de Dieu.

Un projet qu’il va mener à bien.

Puisqu’il a mandaté son Fils pour le faire.

 

La volonté de Dieu, c’est que les aveugles voient,

et que ceux qui sont emprisonnés sortent de leur cachot.

Et, bien sûr, cela nous concerne.

 

Nous sommes aveugles,

puisque nous ne voyons pas la main de Dieu

partout à l’œuvre autour de nous.

Et nous sommes aussi prisonniers.

De nos schémas de pensée.

De ces certitudes si fortes et si massives

qui nous empêchent de suivre d’autres chemins,

et d’explorer la richesse de la vie,

d’accueillir toutes les occasions de rencontre,

toutes les surprises que Dieu nous y a préparées.

 

« Aujourd’hui est accomplie

cette parole de l’Écriture

que vous venez d’entendre. »

 

Ce que Jésus dit tout d’abord dans la synagogue de Nazareth,

c’est que Dieu n’abandonne pas les humains à leurs errances,

à leurs enfermements.

On est ici à l’opposé de cette idée que certains se font

d’un Dieu qui nous regarderait de loin

nous épuiser face aux défis de la vie,

avant de corriger la copie que nous lui aurons remise.

 

C’est une très grande erreur, pour ne pas dire une hérésie,

d’associer Dieu et passivité, Dieu et distance.

Toute la Bible nous présente un Dieu concerné,

un Dieu qui s’engage,

un Dieu qui le premier fait le pas.

« Dieu avec nous », « Emmanuel »,

comme nous venons de le rappeler à Noël.

 

Et cet engagement a un visage.

Jésus n’est pas qu’un ambassadeur, un porte-parole.

C’est un mandataire.

Il a été consacré, il a été oint

pour incarner ce souci,

cette sollicitude de Dieu pour les humains.

Les mots retranscrits par Ésaïe

ne sont pas des paroles en l’air.

Jésus en est la preuve : elles sont réalité.

 

« Aujourd’hui est accomplie

cette parole de l’Écriture

que vous venez d’entendre. »

 

L’affirmation de Jésus est très forte.

Trop forte, peut-être.

« C’est trop beau pour être vrai. »

On aimerait des preuves de ce qu’il avance.

« Qu’il guérisse les patients de l’hôpital ophtalmologique !

Après on verra… »

Tout d’abord la méfiance, et non la joie.

 

« Qu’il fasse d’abord ses preuves ! »

Seulement c’est nous qu’il vient libérer.

Et il ne le fera pas contre notre gré.

Nous non plus, nous ne sommes pas spectateurs.

Nous ne sommes pas experts à l’examen.

Nous sommes pris dans une relation.

Nous avons à nous engager dans une relation, à notre place.

 

 

Nous vivons aujourd’hui le dimanche missionnaire.

Avec tout ce que cette dynamique a porté.

De l’enthousiasme, de l’engagement, de la générosité.

Mais aussi des aveuglements, de la brutalité.

 

Les paroles de Jésus sont si belles, si pleines d’élan.

Nous aussi nous voulons

annoncer la bonne nouvelle aux pauvres,

et renvoyer libres ceux qui sont dans l’oppression.

En y mettant les moyens.

En faisant beaucoup plus que ce que Jésus

a réussi faire pendant sa vie.

 

Il y a quelque chose de fondamentalement juste dans la mission.

Par notre baptême, nous avons été unis au Christ et à sa vie.

Nous avons été associés à cette onction que Dieu lui a conférée.

Nous aussi nous avons été chargés de publier

la liberté aux captifs et le recouvrement de la vue aux aveugles.

 

Seulement parfois on a oublié

que c’est seulement dans le Christ et avec le Christ,

que nous pouvons le faire.

Que pour participer à ce mouvement et le prolonger,

il faut d’abord l’accueillir soi-même :

laisser le Christ nous ouvrir les yeux et le cœur,

et guider nos pas hors de ces prisons

qui barricadent nos esprits et nos vies.

 

Oui, avant de chercher à faire des frères et sœurs en Christ,

il faut se découvrir et se montrer frères et sœurs en humanité.

Non pas faire briller nos forces, nos compétences,

mais ne pas avoir peur d’exposer nos fragilités et nos faiblesses.

 

Cela vaut pour l’outre-mer.

Et cela vaut aussi pour le canton de Vaud et pour Yverdon.

 

Notre Église cherche à donner une image de professionnalisme.

De la compétence.

De l’efficacité.

Des teams performants.

 

Le signe, pense-t-on, que l’on est prêt à libérer les autres.

Les marques selon moi que, la vraie prison,

celle qui fait le plus souffrir notre monde,

on y est tout autant enfermé que les autres.

Et l’on n’est nullement prêt à le reconnaître.

 

 

Alors ne l’oublions pas, Jésus dit :

« Aujourd’hui est accomplie

cette parole de l’Écriture

que vous venez d’entendre. »

 

Oui, c’est aujourd’hui que le Christ vient à nous.

C’est aujourd’hui qu’il veut nous libérer.

Il l’a déjà fait bien des fois.

Mais cela ne veut pas dire qu’aujourd’hui

nous n’ayons pas encore besoin de son aide.

 

Être le corps du Christ, ce n’est pas remplacer le Christ.

C’est être uni à Lui.

C’est être irrigué par Son Esprit.

C’est être encore et encore libéré par Lui.

 

La mission, ce n’est pas apporter un modèle

que l’on pourrait enseigner avec des mots ou des schémas.

C’est partager une vie qui circule en nous et qui vient de Dieu.

 

Et on ne peut le faire que si l’on vit déjà cette vie.

Dans sa personne. Et aussi dans l’Église.

 

Amen