Première lecture : livre du prophète Daniel, chapitre 7, versets 9-14
Pendant que je regardais, on a placé des trônes et l’Ancien des jours s’est assis. Son vêtement était aussi blanc que la neige et les cheveux de sa tête pareils à de la laine pure. Son trône était de flammes et ses roues étaient un feu dévorant. Un fleuve de feu coulait et sortait de devant lui. Des dizaines de milliers le servaient et des centaines de millions se tenaient debout devant lui. Les juges se sont assis et des livres ont été ouverts. (…)
Pendant que je regardais dans mes visions nocturnes, quelqu’un qui ressemblait à un fils de l’homme est venu avec les nuées du ciel. Il s’est avancé vers l’Ancien des jours et on l’a fait approcher de lui. On lui a donné la domination, la gloire et le règne, et tous les peuples, les nations et les hommes de toute langue l’ont servi. Sa domination est une domination éternelle qui ne cessera pas et son royaume ne sera jamais détruit.
Deuxième lecture : livre de l’Apocalypse, chapitre 1, versets 4-8
De la part de Jean aux sept Églises qui sont en Asie : que la grâce et la paix vous soient données de la part de Dieu, celui qui est, qui était et qui vient, de la part des sept esprits qui sont devant son trône et de la part de Jésus-Christ, le témoin fidèle, le premier-né d’entre les morts et le chef des rois de la terre ! À celui qui nous aime, qui nous a lavés de nos péchés par son sang et qui a fait de nous un royaume, des prêtres pour Dieu son Père, à lui soient la gloire et la domination aux siècles des siècles.
Le voici qui vient avec les nuées. Tout œil le verra, même ceux qui l’ont transpercé, et toutes les familles de la terre pleureront amèrement sur lui. Oui. Amen ! « Je suis l’Alpha et l’Oméga, dit le Seigneur Dieu, celui qui est, qui était et qui vient, le Tout-Puissant. »
Troisième lecture : l’Évangile selon Jean, chapitre 18, versets 33-37
Pilate rentra dans le prétoire, appela Jésus et lui dit : « Es-tu le roi des Juifs ? » Jésus lui répondit : « Est-ce de toi-même que tu dis cela ou d’autres te l’ont-ils dit de moi ? » Pilate répondit : « Suis-je un juif, moi ? Ta nation et les chefs des prêtres t’ont livré à moi. Qu’as-tu fait ? » Jésus répondit : « Mon royaume n’est pas de ce monde. Si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu pour moi afin que je ne sois pas livré aux Juifs. Mais en réalité, mon royaume n’est pas d’ici-bas. »
Pilate lui dit : « Tu es donc roi ? » Jésus répondit : « Tu le dis, je suis roi. Si je suis né et si je suis venu dans le monde, c’est pour rendre témoignage à la vérité. Toute personne qui est de la vérité écoute ma voix. » (Amen)
Je vais commencer par 2 questions : dans les 3 lectures d’aujourd’hui, avez-vous remarqué le mot clé, ou les mots clé qui reviennent à plusieurs reprises ? …..Roi, règne, royaume,….Et cela nous aidera à répondre à la deuxième question : aujourd’hui, nous sommes le dernier dimanche de l’année liturgique. La nouvelle année liturgique commence la semaine prochaine avec le premier dimanche de l’Avent. Et il y a une fête chrétienne, célébrée par nos frères et sœurs catholiques, qui tombe sur ce dernier dimanche et qui s’appelle ? La fête du Christ Roi. Cette fête célèbre le fait que Jésus-Christ est le Roi du monde, et aussi qu’il est notre Roi, qu’il règne sur nos cœurs. Nous ne sommes pas obligés de célébrer cette fête, mais c’est une bonne occasion de se demander : quel est ce roi dont nous attendons la venue ? À quoi ressemble son Royaume ? Mais avant de parler de Jésus, remontons un peu en arrière et voyons l’histoire de la royauté dans le peuple d’Israël, telle qu’elle nous est racontée dans l’Ancien testament. On va prendre comme point de départ la sortie d’Égypte. Pendant longtemps, les Israélites n’ont pas de roi. Ils quittent l’Égypte où ils étaient esclaves, sous la conduite de Moïse. Après 40 ans, ils entrent dans le pays promis guidés par Josué, le successeur de Moïse. Commence alors une période de presque 2 siècles où le peuple est dirigé par des juges : des hommes et des femmes capables de juger le peuple et d’assembler les différentes tribus d’Israël pour se défendre contre les attaques des peuples voisins. Les plus connus parmi les juges sont p.ex. Débora, Gédéon et Samson.
Comme nous le raconte le 1er livre de Samuel, arrive un moment où le peuple souhaite avoir un roi, comme tous les autres peuples. Et Dieu exauce leur désir. Mais nous le savons bien, le premier roi d’Israël, Saül, ne se montre pas à la hauteur, et Dieu choisit David pour régner à sa place. David, le plus jeune des 8 frères, que ses parents oublient d’appeler quand le prophète Samuel arrive chez eux à Bethléem. Mais Dieu choisit David, parce que, selon ses propres paroles « il ne s’arrête pas aux apparences, mais voit jusqu’au fond du cœur. » David deviendra le prototype du bon roi, un roi fidèle à Dieu, et tous les rois suivants seront comparés à lui. Le Royaume va encore prospérer sous son fils Salomon. Puis il sera divisé en deux : au nord, plus grand, le Royaume d’Israël, avec Samarie comme capitale, et au sud, plus petit, le royaume du Juda, dont la capitale est Jérusalem. En 722, c’est la fin du Royaume d’Israël, vaincu par les Assyriens. Le Royaume du Juda tombera environ 150 ans plus tard, en 587, conquis par le roi babylonien Nabucodonosor. C’est la période de l’exil. La Judée sera ensuite occupée par les Perses, suivis par les Grecques. Après une période d’indépendance qui nous est racontée dans les livres des Maccabées, la Judée est de nouveau occupée, cette fois par les Romains, en l’an 63 avant JC. Pas étonnant que dès la division du Royaume, et plus particulièrement dès la période de l’exil, le peuple place son espoir dans la venue d’un roi qui fera régner à jamais la justice et la paix, le fils de David, le Messie. Celui qui va libérer le pays de ses occupants et rétablir le Royaume d’Israël. Le prophète Michée prédit la naissance du Messie à Bethléem.
Ce qui nous ramène à Jésus, né à Bethléem lors du règne de l’empereur Auguste. Drôle de naissance pour un roi, dans une étable au milieu des animaux. Peu de gens s’attendaient à un roi aussi humble. Né dans une famille pauvre, comme le fils d’un charpentier. Qui grandit à Nazareth, une ville sans importance, et qui a plutôt mauvaise réputation. Un roi qui, une fois adulte, travaille pour gagner sa vie, comme tout le monde, pour ensuite vivre comme un prédicateur itinérant sans le sou. La vie de Jésus est comme encadrée par ce titre :
« le roi des juifs » Peu après sa naissance, des mages venus d’Orient arrivent à Jérusalem avec la question : « Où est l’enfant qui vient de naître, le roi des Juifs ? » Et quand Jésus est crucifié, au-dessus de sa tête, Pilate fait placer l’écriteau : « Celui-ci est Jésus, le roi des Juifs. » Pourtant, quand il prêche aux foules, Jésus ne se proclame pas roi. Il interdit même à ses disciples de dire aux autres qu’il est le Messie. Et quand un jour, les foules veulent le proclamer roi, il leur échappe. Jésus n’est pas venu pour être un libérateur militaire et politique. Il est venu pour proclamer l’arrivée imminente du Royaume de Dieu : « Le Royaume de Dieu s’est approché ! Changez de comportement et croyez à la bonne nouvelle ! » Si Jésus est un roi étonnant, le Royaume qu’il prêche est plus étonnant encore. Avant de continuer, rappelons-nous que le Royaume de Dieu, ou le Règne de Dieu, ne commence pas à un moment bien défini, après notre mort ou à la fin des temps p.ex. Même s’il n’est probablement pas encore pleinement accompli, il est déjà là, au milieu de nous, comme le dit Jésus. On peut donc entrer dans le Règne de Dieu déjà dans cette vie. Sauf que ce n’est pas évident.
« Mon Royaume n’est pas de ce monde. » dit Jésus à Pilate. Pour y entrer, il faut commencer à vivre selon la logique de ce Royaume, qui est souvent diamétralement opposée à la nôtre. Il n’y a qu’à relire les paraboles de Jésus pour s’en convaincre…D’abord, pour y entrer, il ne faut pas être trop grand et trop riche. « Si vous ne devenez pas comme des petits enfants, c’est sûr, vous n’y entrerez pas. » dit Jésus. Et il dit également : « Comme il sera difficile à ceux qui ont des richesses d’entrer dans le règne de Dieu ! » « Il est plus facile pour un chameau de passer par le trou d’une aiguille que pour une personne riche d’entrer dans le Règne de Dieu. » Et Jésus ne parle pas seulement des milliardaires, il y a toutes sortes de richesses qui peuvent nous empêcher d’entrer dans le Règne de Dieu. Pour commencer, il est donc important d’être pauvre devant Dieu. Pas forcément financièrement, mais dans le sens de petit, humble, avoir les mains vides. On peut commencer par la reconnaissance. Reconnaître que tout ce que nous avons n’est pas notre propriété, mais que c’est un cadeau que Dieu nous fait. Et que tout ce que nous pouvons Lui donner, c’est Lui qui nous l’a donné en premier. On peut aussi être pauvre devant Dieu si on a l’humilité de reconnaître que notre intelligence, même si elle est exceptionnelle parmi les êtres vivants, ne suffit pas à comprendre les voies de Dieu, sa manière d’agir, ses mystères. Que parfois cela nous dépasse…
Jésus dit à Pilate : « Mon royaume n’est pas de ce monde. Si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu pour moi afin que je ne sois pas livré aux Juifs. Mais en réalité, mon royaume n’est pas d’ici-bas. » Dans notre monde, ce sont souvent les plus forts qui écrasent les faibles. Des rois, des dirigeants et des dictateurs en tout genre imposent leurs lois à leurs peuples, par la force et la répression. Mais Jésus est un Roi qui nous dit : « laissez-moi vous instruire, car je suis doux et humble de cœur. » Dieu, même s’il est tout-puissant, envoie son Fils pour vaincre le mal et la mort non pas par une répression sanglante, mais par l’amour. Un amour qui se donne gratuitement, sans condition. Un amour qui pardonne. Un amour sans demi-mesure, qui va jusqu’au bout, jusqu’au don de sa vie. Et pour vivre selon la logique du Royaume de Dieu, nous sommes invités à marcher dans les traces de Jésus, à devenir ses disciples. Le laisser régner sur nos cœurs. Essayer de mettre en pratique ses paroles, ce qui est tout sauf facile. Prenons au hasard : ne jugez pas et vous ne serez pas jugés ; aimez vos ennemis ; si quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends l’autre joue ; pardonne jusqu’à 70 fois 7 fois etc. Parfois, on y arrive. Parfois, on échoue. Mais ce n’est pas trop grave. Dieu n’est pas un patron sévère qui demande des résultats impeccables. Il est notre Père qui nous regarde avec bienveillance, qui nous pardonne nos erreurs et qui se réjouit de nos réussites. Et chaque fois que nous arrivons à ne pas juger les autres, à aimer quelqu’un qui ne nous aime pas, à tendre l’autre joue, à pardonner, le Royaume de Dieu est déjà un peu là, au milieu de nous. Amen