Vos lieux de culte Église 29

"Mais Dieu est riche en miséricorde ;

à cause du grand amour dont il nous a aimés,

alors que nous étions morts à cause de nos fautes,

il nous a donné la vie avec le Christ – c’est par grâce que vous êtes sauvés –,

avec lui, il nous a ressuscités et fait asseoir dans les cieux, en Jésus Christ.

Ainsi, par sa bonté pour nous en Jésus Christ,

il a voulu montrer dans les siècles à venir l’incomparable richesse de sa grâce.

C’est par la grâce, en effet, que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi ;

vous n’y êtes pour rien, c’est le don de Dieu.

Cela ne vient pas des œuvres, afin que nul n’en tire fierté.

Car c’est lui qui nous a faits ;

nous avons été créés en Jésus Christ pour les œuvres bonnes

que Dieu a préparées d’avance afin que nous nous y engagions."

Lettre aux Éphésiens, chapitre 2, versets 4 à 10

 

« C’est par grâce que vous êtes sauvés. »

 

Frères et sœurs,

 

dans certains pays,

il y a l’institution de la grâce présidentielle :

le président peut libérer

des prisonniers

sans avoir de compte à rendre

à personne,

et sans que la justice puisse intervenir

et bloquer le processus.

 

Cela ne va pas sans poser des problèmes :

le président peut libérer certains de ses amis

qui ont été sanctionnés à juste titre

pour des problèmes de corruption.

Cela s’est vu il n’y a pas si longtemps

en République tchèque.

 

Et dans ce même pays,

beaucoup de personnes en veulent encore

à Vaclav Havel

qui avait décrété une grande amnistie

quand il avait été nommé pour la première fois président.

Certains criminels y avaient vu

comme une invitation à reprendre leurs activités :

vols, et aussi homicides.

 

« C’est par grâce que vous êtes sauvés. »

 

L’apôtre met en avant

que notre salut n’est pas

couvert par nos mérites.

C’est un don gratuit.

 

Seulement,

ce mot de grâce

ne va pas sans problèmes.

Une grâce, c’est forcément une exception.

Avec aussi quelque chose d’arbitraire :

un caprice, une fantaisie du monarque.

 

Si c’est par grâce que je suis sauvé,

et s’il est impossible

que l’on soit sauvé autrement que par grâce,

alors il faut que d’autres ne soient pas sauvés.

 

La grâce est une exception.

Et il n’y a pas d’exception sans règle.

Donc, si je suis sauvé par grâce,

il faut quand même qu’un grand nombre

soit puni avec toute la rigueur de la loi.

 

J’ai bien sûr de la chance d’être du bon côté.

Mais, puisque c’est par grâce,

qui me dit que celui qui a décidé de faire une exception

ne reviendra pas sur sa décision ?

 

Vous pensez certainement que j’exagère.

Vous n’avez pas tort.

 

Mais ce mot de grâce instille quand même

une certaine couleur,

une certaine atmosphère

que l’on peut qualifier de troublante.

 

« C’est par grâce que vous êtes sauvés. »

 

Avec le temps,

le mot finit par remplacer

ce qu’il désigne.

Il se suffit à lui-même.

Il ne renvoie plus à une expérience,

à une réalité que l’on touche du doigt.

C’est un grand malheur.

 

Les protestants opposent les œuvres et la grâce.

Deux mécanismes.

Et souvent ils ne cherchent pas plus loin.

 

Pourtant, dans la Bible, il y a grâce et grâce.

Le mouvement du Père qui prend son fils dans ses bras

dans la parabole du Fils prodigue

n’a pas grand-chose à voir

avec Pilate libérant Barabbas sur demande de la foule.

 

D’un côté, il y a un cœur qui parle,

qui vibre en voyant celui qui s’approche penaud.

De l’autre, il y a le jeu d’un puissant

qui n’a pas le moindre regard,

le moindre intérêt pour celui qu’il libère.

Qui ne sait rien de lui.

 

Alors,

dépendons-nous de l’arbitraire

d’un souverain qui joue à pile ou face avec nous :

« Pile : tu es libre ;

face : tu vas griller en enfer » ?

 

Ou bien

pouvons-nous compter sur l’amour d’un Père

qui ne prêtera pas attention

à l’insuffisance de nos efforts,

tout simplement

parce qu’il y a chez nous

quelque chose de plus important pour lui ?

 

Parler de grâce,

parler d’acte gratuit,

c’est tronquer la réalité.

Passer sous silence

ce lien essentiel

par lequel Dieu s’est uni à nous.

 

L’amour de Dieu n’est pas une tocade

qu’il pourrait réviser demain.

C’est un engagement qu’il a pris une fois pour toutes,

et en même temps chaque jour à nouveau.

 

Rien d’arbitraire.

Dieu ne joue ni aux dés,

ni à pile ou face.

 

Et ce n’est pas non plus une exception

qui exigerait, pour être valable,

qu’une autre règle soit en cours

dans la majeure partie des cas.

 

« C’est par grâce que vous êtes sauvés. »

 

La grâce, comme la manière d’agir de Dieu.

Le choix de Dieu.

La décision de Dieu.

La volonté de Dieu.

 

La grâce, comme le « Oui ! » de Dieu

à ce qui est,

à ce qu’Il a créé,

à ce qu’Il aime.

 

La grâce, comme le mouvement de générosité

qui porte ce monde,

qui porte la vie.

 

Nous n’avons pas

à pousser un soupir de soulagement

en disant :

« Coup de bol,

je suis du bon côté ! »

 

Nous avons à comprendre

que tout ce qui fait ce monde

est aimé de Dieu,

et donc précieux,

même si, nous,

nous ne voyons pas

ce qu’Il lui trouve.

 

Oui, la valeur de notre vie,

la valeur de ce monde

et de ce qui le compose,

ce n’est pas quelque chose

dont on pourrait faire la liste :

nos réalisations,

nos qualités,

notre utilité.

 

La valeur de notre vie,

la valeur de ce monde

et de ce qui le compose,

c’est simplement cet amour

dont Dieu l’entoure,

cet amour qui le porte.

 

« C’est par grâce que vous êtes sauvés. »

 

Autrement dit,

« vous n’avez rien à faire valoir. »

Ou plutôt,

« vous n’avez pas à chercher

à faire valoir quoi que ce soit :

ce n’est pas ça l’important. »

 

C’est un sacré changement de regard

auquel nous sommes invités.

 

Parce que, justement,

nous ne cessons d’évaluer.

 

Nous parlons de parasites,

d’asociaux,

de bouches inutiles.

Pour les animaux,

nous parlons d’utiles et de nuisibles.

 

Nous exigeons des gages.

Nous faisons passer le monde

devant le tribunal de nos intérêts.

 

Alors que Dieu, Lui,

regarde ce monde en Père

qui refuse de faire de différences

entre Ses enfants.

 

« C’est par grâce que vous êtes sauvés. »

 

Pas par hasard !

Pas par inattention !

Pas par légèreté !

 

Mais par la volonté de Dieu,

par l’engagement de Dieu,

par l’amour de Dieu.

 

Nous ne sommes pas suspendus dans le vide.

Nous sommes portés

par une attention de chaque instant.

Par un cœur qui vibre pour nous.

 

Quelqu’un veut que nous vivions.

 

Nous n’avons pas à faire nos preuves.

Nous n’avons pas à présenter de dossiers.

 

Et nous n’avons pas non plus

à en exiger des autres.

 

C’est cela l’essentiel.

Une tout autre approche de la vie.

Personne n’est ici sur terre à l’essai,

en attendant qu’une commission ou un comité statue.

Personne n’est ici sur terre par erreur,

parce que les contrôles n’ont pas bien fait leur travail.

 

« C’est par grâce que vous êtes sauvés. »

 

La sollicitude de Dieu plus vivifiante,

plus nourrissante que l’oxygène que nous respirons.

 

Dieu, non pas comme une menace,

mais comme un soutien,

un encouragement.

 

Dieu comme le sens de notre vie :

il y a Quelqu’un pour qui nous comptons,

juste parce que c’est Lui,

juste parce que c’est nous.

 

Oui, « c’est par grâce que vous êtes sauvés. »

 

Amen