Vos lieux de culte Église 29

Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu.

Elle était au commencement avec Dieu.

Toutes choses ont été faites par elle, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle.

En elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes.

La lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue.

Il y eut un homme envoyé de Dieu: son nom était Jean.

Il vint pour servir de témoin, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous crussent par lui.

Il n’était pas la lumière, mais il parut pour rendre témoignage à la lumière.

Cette lumière était la véritable lumière, qui, en venant dans le monde, éclaire tout homme.

Elle était dans le monde, et le monde a été fait par elle, et le monde ne l’a point connue.

Elle est venue chez les siens, et les siens ne l’ont point reçue.

Mais à tous ceux qui l’ont reçue, à ceux qui croient en son nom, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu,

lesquels sont nés, non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu.

Et la parole a été faite chair, et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité;

et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme la gloire du Fils unique venu du Père.

Jean lui a rendu témoignage, et s’est écrié: C’est celui dont j’ai dit: Celui qui vient après moi m’a précédé, car il était avant moi.

Et nous avons tous reçu de sa plénitude, et grâce pour grâce;

car la loi a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ.

Personne n’a jamais vu Dieu; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, est celui qui l’a fait connaître.

Évangile selon Jean 1, 1-18

 

« La Parole a été faite chair ;

elle a habité parmi nous. »

 

Frères et sœurs,

 

nous connaissons bien le récit de Noël.

Joseph et Marie qui arrivent à Bethléem depuis la Galilée

à cause d’un recensement.

La ville pleine de voyageurs.

Pas la moindre place dans les maisons pour ces derniers arrivés.

Juste une écurie.

Et c’est là que Marie accouche.

Posant son enfant dans la paille d’une mangeoire.

Ce qui, on l’oublie, n’est pas forcément l’endroit

le plus ragoûtant au monde.

Un animal, en mangeant, ça bave.

 

Bien sûr, avec le temps, on a enjolivé la scène.

On parle d’une étable.

Un mot que l’on n’utilise presque plus que pour cette situation.

Les animaux y sont paisibles et silencieux.

Et aussi tout propres.

Ils ne mangent pas et ne font pas leurs besoins.

Le nouveau-né, lui, ne fait que dormir ou gazouiller.

Il ne pleure pas.

Il ne crie.

Ce qui permet à Marie et Joseph

d’être d’une sérénité parfaite.

Rayonnants d’une douce joie intérieure.

 

Les images d’Épinal ont leur charme.

Mais il n’est pas mauvais d’en sortir.

 

Il n’y a rien de romantique

à donner naissance à un enfant dans une écurie.

Surtout quand ce n’est pas le seul abri

à des kilomètres à la ronde,

mais que tout autour il y a une ville grouillante de vie.

Des maisons chauffées.

Et des tas de gens.

Qui ont d’autres soucis

que cette famille galiléenne de passage.

 

« La Parole a été faite chair ;

elle a habité parmi nous. »

 

L’Évangéliste Jean ne parle pas d’autre chose

que ce que je viens d’évoquer.

Ses mots sont bien sûr solennels et grandioses.

Mais la réalité qu’ils désignent est beaucoup plus simple.

 

La Parole qui a été faite chair,

c’est ce nouveau-né qui, comme tous les nouveau-nés,

pleure quand il a faim ou froid, ou quand il est mouillé.

Le contraste est saisissant :

avec les yeux de la chair,

on ne voit qu’un bébé semblable aux autres,

alors qu’en réalité,

il y a là cette Parole par laquelle tout a été fait :

les astres, les galaxies,

et aussi les océans et tout ce qu’ils contiennent,

tout ce qui vit.

 

Étonnant, non ?

Nous imaginions un projet d’une complexité folle,

nécessitant des milliards de milliards d’ordinateurs en ligne

pour être seulement effleuré dans une miette de sa richesse.

Et c’est un enfant tout petit, tout simple,

en rien différent de celui que nous avons été,

qui nous est présenté.

La clé de la vie.

La clé de l’univers.

La clé de tout.

Dieu qui s’exprime.

Dieu qui se livre.

Dieu qui se révèle.

 

« La Parole a été faite chair ;

elle a habité parmi nous. »

 

Nos traductions ne sont pas aussi précises

qu’on l’imagine.

Dans l’original grec,

il n’est pas dit que la Parole a habité parmi nous,

mais qu’elle « a dressé sa tente parmi nous. »

 

Pourquoi souligner cette différence ?

Parce que, Noël, ce n’est pas qu’un début.

C’est aussi l’aboutissement d’un long chemin.

 

Il suffit de regarder nos bibles

pour comprendre que ce moment

a été précédé par toute une histoire.

Qu’il a été préparé.

 

Bethléem comme lieu de naissance de Jésus,

ce n’est pas un hasard.

C’est la ville d’où venait le roi David,

l’auteur des Psaumes,

et aussi le seul roi, ou presque,

à trouver grâce aux yeux de Dieu.

 

La naissance de Jésus

n’efface pas la première alliance avec le peuple d’Israël.

Elle l’accomplit.

Et c’est pourquoi nos bibles ne se réduisent pas

au Nouveau Testament.

Mais qu’elles sont précédées par ce long récit

qui va d’Adam, de Noé, et surtout d’Abraham, de Moïse,

jusqu’à Marie et Joseph.

Avec tout un jeu de reprises, d’échos, d’harmoniques.

 

« La Parole a été faite chair ;

elle a dressé sa tente parmi nous. »

 

L’évangéliste ne décrit pas ici l’écurie de Bethléem.

Il ne présente pas ce que nos yeux de chair peuvent voir.

Il donne une explication.

Il ajoute une image pour faire comprendre ce qui est en jeu.

 

Vous vous rappelez l’Exode, la sortie d’Égypte.

Tout ce périple à travers le désert.

Et en dehors du campement des Hébreux,

il y avait la tente de la rencontre.

 

Non pas juste le lieu d’offrandes rituelles.

Mais le lieu de la présence de Dieu.

Une présence qui est plus qu’une protection.

Une boussole.

Dieu qui indique le chemin à son peuple.

 

Lorsque la nuée se levait de la Tente de la rencontre,

les Hébreux se mettaient en marche à sa suite.

Mais si elle restait à sa place,

ils ne bougeaient pas.

 

Ce que l’évangéliste dit,

c’est que la présence de Jésus est du même ordre.

Il ne vient pas ajouter une décoration supplémentaire

dans nos salons.

Une petite touche chaleureuse.

Émouvante.

 

Il vient nous inviter à nous mettre en marche.

À sortir de nos enfermements.

De ces prisons souvent confortables

avec leurs marmites de viande.

 

Se mettre en marche pour aller dans le désert.

Sortir de nos centres commerciaux si colorés et si bien chauffés,

pour s’arrêter un moment dans une écurie

où la vie est réduite à son strict minimum.

 

Noël n’est pas un test

pour savoir si nous serions plus généreux,

plus hospitaliers, que les habitants de Nazareth.

Il ne s’agit pas d’accueillir un pauvre hère.

Mais de nous mettre à l’école et à la suite

de cette Parole de Dieu qui s’est faite chair,

et qui vient nous conduire à travers le désert

jusqu’à Son Royaume de justice et de paix.

 

Nous avons fait de Noël la fête du foyer.

Et il est vrai que le Fils de Dieu,

en se faisant notre frère,

nous a tous unis en une grande famille.

 

Mais d’autres couleurs sont présentes dans cette fête.

Ce lieu, non seulement incongru et inconfortable,

mais surtout insalubre, pour une naissance.

Cette Tente de la rencontre qui est à nouveau dressée

pour que nous nous mettions en route,

en sortant de cette prison matérielle que peut être le bien-être.

En sortant surtout de toutes ces prisons mentales

qui nous font croire que nous vivons dans le meilleur des pays,

dans le meilleur des mondes,

et qu’aucune alternative ne vaut la peine d’être envisagée.

 

Noël comme un sursaut.

Noël comme notre quotidien qui se trouve bousculé.

Pour que nous levions les yeux.

Et marchions au-devant d’un autre horizon.

 

Le sens de l’univers,

c’est cet enfant emmailloté et posé sur de la paille.

Dieu qui nous invite

à nous exposer au froid et aux mauvaises odeurs d’une écurie.

Une première étape

sur le chemin qui nous permettra

d’habiter une terre renouvelée

en ayant nous-mêmes dans notre poitrine

un cœur lui aussi renouvelé.

 

À vous tous, un joyeux Noël !

 

Amen