Là-bas, il entra dans la grotte et y passa la nuit.
Or, voici que la parole de l'Éternel lui fut (adressée) en ces mots : "Que fais-tu ici, Élie ?"
Il répondit : "J'ai déployé mon zèle pour l'Éternel, le Dieu des armées ;
car les Israélites ont abandonné ton alliance, ils ont renversé tes autels,
ils ont tué par l'épée tes prophètes ; je suis resté, moi seul, et ils cherchent à prendre ma vie. "
L'Éternel dit : "Sors et tiens-toi sur la montagne devant l'Éternel !"
Et voici que l'Éternel passa ;
un grand vent violent déchirait les montagnes et brisait les rochers devant l'Éternel :
l'Éternel n'était pas dans le vent.
Après le vent, ce fut un tremblement de terre :
L'Éternel n'était pas dans le tremblement de terre.
Après le tremblement de terre, un feu : L'Éternel n'était pas dans le feu.
Enfin, après le feu, un son doux et subtil.
Quand Élie l'entendit, il s'enveloppa le visage de son manteau, il sortit et se tint à l'entrée de la grotte.
Or voici qu'une voix lui dit : "Que fais-tu ici, Élie ?"
1er Livre des Rois, chapitre 19, versets 9 à 13
Ensuite, il obligea les disciples à monter dans la barque
et à le précéder sur l'autre rive, pendant qu'il renverrait les foules.
Après les avoir renvoyées, il monta sur la montagne pour prier à l'écart ;
et le soir venu, il était là seul.
La barque était déjà à une distance de plusieurs stades de la terre,
malmenée par les vagues ; car le vent était contraire.
A la quatrième veille de la nuit, Jésus alla vers eux en marchant sur la mer.
Quand les disciples le virent marcher sur la mer, ils furent troublés
et dirent : "C'est un fantôme !"
Et dans leur crainte, ils poussèrent des cris.
Jésus leur dit aussitôt : "Rassurez-vous, c'est moi, n'ayez pas peur ! "
Pierre lui répondit : "Si c'est toi, ordonne-moi d'aller vers toi sur les eaux."
Et il dit : "Viens !"
Pierre sortit de la barque et marcha sur les eaux pour aller vers Jésus.
Mais en voyant que le vent était fort, il eut peur,
et, comme il commençait à enfoncer il s'écria : "Seigneur, sauve-moi !"
Aussitôt Jésus étendit la main, le saisit
et lui dit : "Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ?"
Ils montèrent dans la barque, et le vent tomba.
Ceux qui étaient dans la barque se prosternèrent devant Jésus
et dirent : "Tu es véritablement le Fils de Dieu."
Évangile selon Matthieu, chapitre 14, versets 22 à 33
« C’est un fantôme ! »
Frères et sœurs,
la réaction des disciples semble bien naïve :
Jésus s’approche d’eux en marchant sur l’eau,
et ils ne le reconnaissent pas.
Au lieu de se réjouir,
ils s’effraient :
« C’est vraiment bizarre !
Ça doit sûrement être un revenant ! »
La parole de Jésus sur la paille et la poutre
nous le rappelle :
les défauts que nous pointons chez les autres
sont souvent ceux
dont nous sommes nous-mêmes affligés
dans une mesure plus grande encore.
Les disciples n’imaginent pas
que Jésus puisse venir les rejoindre
en marchant sur l’eau.
Et ils trouvent donc une autre explication
pour cette forme qui s’approche d’eux.
Dans les moments de détresse,
il est difficile de concevoir que Quelqu’un
puisse venir à notre secours.
Et pourtant Jésus est venu
vers ses disciples en difficulté
en marchant sur les eaux.
Une aide qu’aucun d’eux ne pouvait imaginer.
Une aide qui était inconcevable.
Une aide qui n’avait pas sa place
dans leur champ de vision,
dans leur champ de pensée.
Et c’est tout le drame
de notre société hyper-organisée :
nous sommes persuadés
qu’en dehors de notre champ de vision,
en dehors de notre champ de pensée,
il n’existe rien.
Nous sommes persuadés
d’avoir une vision objective
de toutes les possibilités :
de tous les risques,
de toutes les chances.
D’ailleurs,
quand une catastrophe inédite survient,
comme la pandémie du covid,
ou la guerre en Ukraine,
nous allons tout de suite chercher
un vieux rapport qui pointait ce danger.
Une façon de dire :
« Vous voyez :
rien ne peut nous prendre au dépourvu.
Tout avait été bien prévu. »
Les disciples, eux, n’avaient pas prévu
que Jésus les rejoigne en marchant sur l’eau.
Et quand ils le voient s’approcher,
ils sont incapables de le reconnaître,
incapables de comprendre ce qui se passe.
Et ils s’écrient :
« C’est un fantôme ! »
Beaucoup de croyants
rêvent de voir un miracle.
Sans douter un instant
d’être à même de le reconnaître.
Pour eux, c’est simple :
un miracle,
c’est quand leur rêve
devient réalité.
La tumeur cancéreuse
disparaît sans laisser de traces.
Un gros chèque atterrit
sur le compte dans le rouge.
Des pluies abondantes
mettent un terme à la sècheresse.
C’est bien sûr surprenant.
Mais, en même temps,
cela correspond exactement
à ce que l’on souhaitait.
Lorsqu’il entend un murmure doux et subtil,
Élie, lui, ne dit pas :
« C’est un fantôme ! »
Il s’enveloppe le visage de son manteau,
et sort pour se mettre comme au garde-à-vous
devant la présence de Dieu.
Pourtant,
Dieu qui vient dans un murmure doux et subtil,
c’était vraiment la dernière chose qu’il aurait imaginée,
la dernière chose qu’il aurait souhaitée.
Une armée était lancée à ses trousses
avec pour ordre de le tuer.
Il se sentait lâché de tous.
Au service d’un Dieu qui reste muet
alors que l’on persécute et massacre
ses serviteurs.
« Que fais-tu ici, Élie ?
- J’ai été saisi d’une ardente jalousie
pour l’Éternel, le Dieu des armées ;
car les enfants d’Israël
ont abandonné ton alliance ;
ils ont démoli tes autels ;
ils ont fait périr tes prophètes par l’épée ;
moi seul, je suis resté,
et ils cherchent à m’ôter la vie. »
Élie rêve certainement
d’un retournement de situation,
d’un Dieu puissant
qui ferait entendre sa colère
et sentir sa force.
Un Dieu qui réduirait en cendres
tous ces soldats qui le pourchassent.
Mais en même temps,
il faut être réaliste.
Alors comment ne pas se poser ces questions ?
Et si Dieu n’en avait tout simplement rien à faire de lui, Élie ?
Ou même :
Et si tout simplement Dieu n’existait pas ?
Et si ce n’était qu’une illusion ?
Un rêve qu’Élie aurait fait ?
Dans ce contexte,
percevoir la présence de Dieu
dans un murmure doux et subtil,
c’est tout sauf une évidence.
C’est un vrai miracle.
Bien sûr,
quand on a été éduqué
dans l’idée d’un Dieu sévère,
dur,
pour ne pas dire méchant,
qui ne laisse rien passer,
et qui traque le pécheur,
qui punit le moindre écart,
c’est merveilleux
de découvrir Dieu
comme un murmure doux et subtil.
C’est ce dont on rêvait.
Même si l’on n’osait pas le dire.
Même si l’on n’en était pas conscient.
Mais ce n’est pas la situation d’Élie.
Dieu dans un murmure doux et subtil,
il ne sait pas quoi en faire.
Cela n’entre pas dans ses catégories,
dans ses calculs.
Et pourtant il reconnaît
que Dieu est bien là
dans ce murmure.
Et il s’incline.
C’est d’espérance qu’il est question
dans ces deux récits.
Être prêt à ce que l’on n’imagine pas.
Être prêt à ce que l’on n’attend pas.
Et surtout
recevoir, accueillir
ce secours qui nous vient
sous une forme
qui ne correspond
à rien de connu.
Il me semble que
c’est tout spécialement important
maintenant,
alors que le monde
que nous connaissions
et qui nous semblait immuable
se défait toujours plus rapidement.
Souvent,
on a recours aux vieilles recettes.
Toujours plus de lois, de règlements,
et de structures.
Toujours plus de subventions.
Certains rêvent de dirigeants à poigne.
Mais peut-être
que c’est tout autre chose
que Dieu va nous envoyer,
pour nous permettre de créer du nouveau,
et non pas juste assurer le statut-quo.
Et il en va de même dans l’Église.
Dans nos assemblées vieillissantes,
on rêve parfois de jeunes ministres dynamiques
qui attireraient de nouvelles générations en masse.
Alors que d’autres appellent
à ce que l’on resserre les boulons
au niveau doctrinal,
et que l’on se profile
de façon bien plus tranchante.
Mais peut-être Dieu vient-il
sauver Son Église d’une façon totalement différente,
totalement inédite.
Personne au temps de Jésus
n’imaginait un Messie offrant sa vie
sur un croix !
Et encore maintenant,
bien des personnes se réclamant du christianisme
ont de la peine avec une douceur
qui serait plus qu’un masque,
ou que ce fameux gant de velours
qui cache en réalité une main de fer.
« C’est un fantôme ! », s’écrient les disciples.
Combien de fois ne leur ressemblons-nous pas
quand nous disons :
« C’est une fausse piste ! »
« C’est de la naïveté ! »
« C’est du n’importe quoi ! »
« C’est de l’inconscience ! »
« C’est une folie ! »
On réagit souvent de façon hâtive.
Avec des jugements précipités.
Et cela d’autant plus
que l’on se trouve dans une situation de stress,
que l’on se sent désécurisé.
Depuis quelques années,
nous sommes sous toujours plus sous pression.
Il y a eu le covid.
Il y a la guerre en Ukraine.
Et l’on constate aussi que notre Église
n’a plus la force et l’assurance
qu’elle avait il y a seulement cinq ans.
La solution de facilité,
c’est de se croire abandonné,
et de se morfondre sur soi-même :
« Pauvre de moi !
Je ne méritais vraiment pas ça ! »
La Bible, elle, nous invite
à rester aux aguets.
Non pas pour éviter les coups.
Mais avant tout pour être à même
d’accueillir ce Dieu
qui vient nous aider
par des chemins étonnants.
Alors n’en doutons pas :
il est ici qui nous porte,
en ce moment.
Non, Dieu ne nous laisse pas tomber.
Seulement son salut, son aide,
dépassent infiniment ce que nous pouvons imaginer.
Ils ne sont pas juste beaucoup plus grands.
Ils sont surtout différents,
surprenants,
inédits.
Alors, ne cédons pas à la première impression.
Ne cédons pas à la peur.
Et surtout, sachons nous laisser surprendre.
Amen