Vos lieux de culte

Une chose que l’on m’a souvent répétée (et que je n’ai toujours pas assimilée !), c’est que je devrais brider ma nature colérique et éviter de dire des paroles cassantes qui pourraient me valoir des ennuis. Et il est vrai que souvent, après coup, je me sens honteux de ma dureté.

Pourtant, en observant autour de moi, j’ai remarqué que nombre de personnes se montrent tout aussi intransigeantes et implacables que moi. Seulement elles le font avec un sourire avenant. Et dans ce cas, personne n’y voit le moindre problème.

Le ton est différent, bien sûr. Mais, pour ce qui est de la demande, le résultat est le même : un refus. Ce que l’on retient pourtant, c’est l’élégance parfaite des paroles : « Je suis navré, mais ce n’est pas possible en ce moment ». Alors que moi, je ne sais plus où me mettre avec mes nerfs qui ont lâché.

Le modèle à suivre semble donc évident. Et pourtant la stratégie n’est pas sans risque. Au bout d’un moment, on ne se rend même plus compte du jeu que l’on joue. Et l’on se met à croire que le sourire affiché est la marque d’une bienveillance réelle. Comme s’il n’était pas avant tout une manière de se protéger.

Bien sûr, mes colères aussi sont une forme de masque. Ne pas laisser les autres approcher et voir ce qu’il y a en moi. Se faire meilleur que l’on est ou se faire pire que l’on est, c’est un peu la même chose : mettre un masque pour cacher qui l’on est vraiment. À ses propres yeux et à ceux des autres.

Pour connaître son vrai visage, le miroir de la salle de bains ne suffit pas. Des proches nous aident parfois à prendre conscience de cette stylisation que nous nous imposons et qui ne nous correspond pas vraiment.

L’aide la plus importante, c’est la prière qui l’apporte. On se retrouve alors face à Celui à qui l’on ne peut pas raconter d’histoires. Il est bon de prendre du temps pour être avec lui. Et découvrir ainsi qui nous sommes vraiment derrière ce masque où il est si confortable de se dissimuler.

 

Jean-Nicolas Fell

pasteur de l’EERV à Yverdon-Les-Bains